Le dérèglement climatique est là, et ses conséquences sont chaque jour plus palpables. Longtemps minoré par rapport aux industries lourdes, beaucoup plus émettrices de CO2, le rôle de la communication pour mettre nos sociétés sur une trajectoire bas carbone est pourtant clé. Il s’agit bien sûr pour notre secteur d’améliorer ses pratiques afin de respecter les limites planétaires, mais aussi de réfléchir aux messages que nous diffusons pour contribuer à faire changer les mentalités. Ça vous semble compliqué ? Suivez le guide ! 

La communication, petite fraction du problème ? 


Si l’on raisonne en termes de secteurs et à l’échelle mondiale,
les transports sont responsables de 24 % des émissions de CO2, l’industrie et la construction de 19 %, et l’ensemble du secteur tertiaire – incluant la communication – de moins de… 4 %¹. Même constat si l’on se réfère aux types de supports : l’ensemble des activités liées au numérique (bien au-delà de la seule publicité digitale) ne représente aujourd’hui que 4 % des émissions de gaz à effet de serre². 

Seulement voilà : à force de se comparer en permanence aux « mauvais élèves », la fonction communication a pris du retard dans sa nécessaire mue écologique. Aucun secteur ni acteur ne détient à lui seul la clé de la décarbonation de nos économies, et tous doivent se transformer. Cela passe d’abord par une métamorphose de nos pratiques vers plus de sobriété et d’efficacité, pour limiter la consommation d’énergie et de ressources naturelles. 

Un vrai levier de transformation 


Toutefois, notre secteur a ceci de particulier que sa production a des répercussions bien au-delà de son propre champ. La communication et la publicité influencent les mentalités et les usages :
on estime ainsi qu’en France, entre 1992 et 2019, les dépenses des annonceurs ont conduit à une augmentation cumulée de 5,3 % de la consommation³… ce qui, sur une planète déjà en surchauffe, n’est pas neutre. La bonne nouvelle, c’est qu’à l’inverse notre secteur peut aussi contribuer à faire changer les esprits et la société. 

La communication est d’ailleurs un levier clairement identifié dans les politiques publiques. En France, la loi Climat et résilience de 2021⁴ pose les premiers jalons pour encadrer les pratiques, tandis qu’au niveau mondial le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) mentionne, pour la première fois dans son rapport de 2022⁵, la « régulation de la publicité » comme un enjeu pour valoriser la sobriété dans nos modes de vie. 

La décarbonation comme opportunité 


La pression venant du législateur va donc continuer à aller crescendo.
Si cette exigence croissante peut apparaître comme une contrainte, il s’agit aussi pour vous d’une opportunité. Celle, d’abord, d’anticiper les évolutions afin de vous mettre en conformité et ne pas risquer de voir un jour vos campagnes, messages et outils refusés… voire sanctionnés !

C’est aussi un enjeu de réputation : la société elle aussi évolue et, tôt ou tard, clients et consommateurs n’accepteront plus certaines pratiques trop carbonées ou certains messages en décalage avec leurs propres usages. Il en va de même côté RH, où le niveau d’implication des salariés est souvent corrélé aux valeurs de votre entreprise et à votre engagement sur le climat. Cela influe également sur le recrutement et sur votre capacité à attirer les talents. 

Enfin, les investissements liés à la décarbonation peuvent in fine être pour vous une source d’économies et générer pour votre entreprise un gain de compétitivité. Les coûts de l’énergie flambent, ceux des matières premières aussi… Mettre en place des process plus sobres et plus efficaces reste donc une bonne affaire pour tout le monde. 

D’abord mesurer, puis réduire 


Pour décarboner sérieusement vos pratiques de communication, l
a première chose à faire est d’évaluer l’existant. Autrement dit, de réaliser un bilan carbone sur l’ensemble de votre activité. L’idéal est d’opter pour un bilan « scope 3 ». Celui-ci inclut l’impact direct de vos productions, mais aussi les émissions indirectes liées à leur consommation d’énergie et à l’ensemble de leur cycle de vie. 

Vous saurez ainsi où se situent les principaux leviers de décarbonation et pourrez construire un plan en priorisant vos actions. L’une des clés sera de travailler à l’éco-conception de vos campagnes, actions et supports. S’il s’agit par exemple d’un projet éditorial print, vous pouvez agir sur le format des documents, le choix de l’imprimeur, les encres, le grammage du papier, le tirage, l’emballage, ou encore le transport. 

Du côté de la communication digitale, les efforts vont notamment porter sur l’allégement du poids des fichiers, sites, applications ou newsletters, du fait de la consommation électrique des serveurs sur lesquels tous ces outils sont hébergés. En ce qui concerne l’événementiel, on sera particulièrement vigilant sur la production des éléments physiques (stand, matériel, décors, etc.) et sur leur recyclage, ainsi que sur l’offre éventuelle de restauration. Enfin, au niveau des productions audiovisuelles, on évitera par exemple de déplacer des équipes et du matériel sur de longues distances, avec un usage immodéré de l’avion. 

Et enfin, seulement, compenser 


En dernier ressort, concernant les émissions que vous n’aurez pas pu éviter,
il est utile de les compenser. Cela consiste à financer des projets qui permettent soit de séquestrer du carbone déjà présent dans l’atmosphère, soit d’en réduire les émissions. On évoque souvent des projets de gestion des forêts et des sols (plantations d’arbres, etc.), mais il peut aussi s’agir de financer les énergies renouvelables, ou encore de contribuer à la réduction des émissions de méthane des décharges à ciel ouvert. 

Si vous souhaitez approfondir cette question, l’ADEME (l’Agence de la transition écologique) consacre un guide complet⁶ à la compensation volontaire. Elle insiste notamment sur la nécessité de choisir des projets labellisés pour éviter les pièges dans un secteur encore mal régulé. Gardez également en tête que la compensation n’est pas une baguette magique, et qu’il en va du CO2 comme de tous les déchets : le meilleur est celui que l’on ne produit pas. 

Non au greenwashing 


Si le secteur de la communication doit réduire ses émissions, encore faut-il que les messages qu’il diffuse aillent dans le même sens.
Car il s’agit là de l’essentiel de notre impact à nous, communicants : même si vous pourriez avoir éco-conçu tous vos supports pour faire la promotion d’une carte bancaire elle-même recyclée, si l’établissement qui est derrière continue d’investir dans le développement des énergies fossiles, tout cela sera considéré, ni plus ni moins, comme du greenwashing. 

Les entreprises savent qu’il leur est profitable de mettre en avant des arguments écologiques. Mais lorsque ces allégations servent à masquer la réalité de produits ou services nettement moins vertueux, cela crée de la confusion dans l’esprit des consommateurs et invisibilise les vraies avancées mises en place par d’autres acteurs. Cela sans parler des incitations plus ou moins directes à la surconsommation, et donc à la surproduction, qui restent monnaie courante dans notre secteur et génèrent d’importantes émissions. 

Oui aux nouveaux imaginaires 


À
 l’inverse, de plus en plus de marques s’engagent dans des campagnes de communication qui participent à l’émergence de nouveaux imaginaires, plus compatibles avec la transition écologique. Les marques mettent en avant des valeurs, des modes de vie et des comportements plus respectueux des humains et de la Terre : de nouvelles façons d’habiter, de se déplacer, de se nourrir, de s’équiper… Bref, de faire société.

Même dans le secteur textile, souvent pointé du doigt pour sa surproduction et sa forte empreinte carbone, les lignes bougent. Des acteurs émergents comme Loom, ont pris le parti radical de ne pas faire de publicité. Tandis qu’une grande marque comme Levi’s a pu prendre la parole en 2021 avec une campagne atypique et remarquée invitant le public à… consommer moins ! Misant sur la qualité de ses vêtements, l’entreprise encourage ainsi à « acheter mieux » pour « porter plus longtemps », dans une logique de sobriété. 

Des ressources et des acteurs pour vous accompagner 


En communication comme ailleurs, la route vers la neutralité carbone est longue et sinueuse. Fort heureusement, il existe des ressources comme « Le Guide de la communication responsable », édité par l’ADEME. Celui-ci vous offre un panorama complet des enjeux de notre secteur, ainsi que des conseils très concrets pour éco-concevoir vos campagnes, actions et outils. 

Sources 

1 – Répartition sectorielle des émissions de CO2 dans le monde | Ministère de la transition écologique

2 – Impact du numérique sur l’environnement : quelles sont les 3 sources de pollution ? | Carbo

3 – La communication commerciale à l’ère de la sobriété | Institut Veblen

4 – LOI n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets | Légifrance

5 – (en) Climate Change 2022 – Mitigation of Climate Change (PDF) | IPCC

6 – La compensation volontaire | ADEME